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mise rose en rejetant d’un coup toute sa provision de mots français, et en riant il tape le Français sur le ventre. Les Français rient aussi.

Ils ne sont pas jolis ces b… de Russes ! — dit un des zouaves du groupe français.

De quoi de ce qu’ils rient donc — dit un brun à l’accent italien en s’approchant des nôtres.

Caftan boune ! — dit le brave soldat en examinant le caftan brodé du zouave. Et de nouveau tout le monde rit.

Ne sors pas de ta ligne ! À vos places, sacré nom ! — crie le caporal français, et les soldats visiblement mécontents se dispersent.

Voilà que dans le cercle des officiers français brille notre jeune officier de cavalerie. Il s’agit d’un certain comte Sazonoff que j’ai beaucoup connu, — dit l’officier français à une épaulette — c’est un de ces vrais comtes russes comme nous les aimons.

Il y a un Sazonoff que j’ai connu, — dit l’officier de cavalerie, — mais il n’est pas comte, du moins que je sache, un petit brun de vôtre âge à peu près.

C’est ça, c’est lui. Oh ! que je voudrais le voir, ce cher comte. Si vous le voyez, je vous prie bien de lui faire mes compliments, capitaine Latour, — répondit-il en saluant.

N’est-ce pas terrible la triste besogne que nous faisons ? Ça chauffait cette nuit, n’est-ce pas ? — dit, en montrant les cadavres, l’officier de cavalerie qui désirait continuer la conversation.