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— Mais tu n’es pas bien, Anatole, lui dit Marie Pavlovna. Je t’en prie, ne fume pas.

— Ah ! laisse-moi ! fit-il avec colère ; et il alluma la cigarette, mais aussitôt il se remit à tousser et sentit comme une nausée. Après avoir craché il continua : Non, nous n’avons pas fait ce qu’il fallait. Non pas cela. Assez de discussions : nous devons tous nous unir… et les anéantir !

— Mais eux aussi sont des hommes, observa Nekhludov.

— Non, ce ne sont pas des hommes ceux qui peuvent faire ce qu’ils font !… Voilà, on dit qu’on vient d’inventer des bombes et des ballons. Eh bien ! monter en ballon et les saupoudrer de bombes, comme des punaises, jusqu’à ce que tous soient exterminés !… Oui… Parce que… commença-t-il, mais son visage devint tout rouge, il eut une quinte de toux plus violente encore, et le sang jaillit de sa bouche.

Nabatov courut chercher de la neige. Marie Pavlovna prépara des gouttes de valériane qu’elle lui présenta. Mais lui, les yeux fermés, repoussant la jeune fille de sa main maigre et blanche, essayait de rattraper son souffle. Quand la neige et l’eau froide l’eurent un peu calmé et qu’on l’eut mis au lit pour la nuit, Nekhludov prit congé de tous et gagna la sortie avec le sous-officier qui était venu le chercher et l’attendait depuis longtemps.

Les condamnés de droit commun s’étaient cal-