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d’hui le sol en friche seulement lorsque le propriétaire foncier, tel le chien sur le foin, ne repoussera plus de la terre ceux qui peuvent la travailler.

— Écoutez. Dmitri Ivanovitch, ce que vous dites est absolument insensé ! Est-il possible de supprimer, à notre époque, le droit de propriété sur la terre ? C’est votre dada, je le sais, mais permettez-moi de vous le dire franchement…

Ignace Nikiforovitch pâlit, et sa voix trembla. Évidemment la chose le touchait de près.

— Sincèrement je vous conseille de bien réfléchir encore à cette question avant de songer à sa solution pratique.

— Vous voulez parler de mes affaires personnelles ?

— Oui. À mon avis, nous tous qui occupons une certaine situation devons assumer les devoirs qui en résultent pour nous. Nous devons conserver les conditions de l’existence dans lesquelles nous sommes nés, que nos parents nous ont léguées et que nous devons transmettre à nos descendants…

— Et moi je regarde de mon devoir…

— Permettez, continua Ignace Nikiforovitch sans se laisser interrompre. Je ne parle ni de moi ni de mes enfants ; leur sort est assuré et quant à moi je gagne assez pour vivre dans l’aisance, et je pense que mes enfants y vivront aussi. Ma protestation contre vos actes insuffisamment réfléchis,