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L’écart d’une ou de plusieurs de ces sortes de travaux et le travail spécialisé se produira seulement quand l’homme qui se livre à un travail spécial, aimant ce travail et sentant qu’il le fait mieux que les autres, sacrifiera ses avantages pour satisfaire aux exigences qui le sollicitent.

Ce n’est qu’avec cette opinion sur le travail, et avec la division naturelle du travail qui en découle, que se détruira cette malédiction que notre imagination attache au travail, et chaque travail deviendra une joie, si un homme fait un travail indiscutablement utile et agréable, point pénible, ou s’il a la conscience du sacrifice en accomplissant un travail spécial plus pénible, mais accompli pour le bien des autres. Mais la division du travail est plus avantageuse. Pour qui ?

Il est plus avantageux de faire le plus vite le plus grand nombre possible de bottes et de calicot. Mais qui fera ces bottes et ce calicot ?

Il y a des hommes qui, de génération en génération, ne font que des têtes d’épingles. Comment ce peut-il être plus avantageux pour ces hommes ? S’il ne s’agit que de faire le plus possible de calicot et d’épingles, alors c’est bon. Mais il s’agit des hommes et de leur bien, et le bien des hommes est dans la vie, et la vie est dans le travail. Comment donc peut-il se faire que l’obligation d’un travail douloureux, pénible, soit plus avantageuse pour les hommes ?