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Je regardais aussi ces derniers pendant qu’ils se promenaient dans les rues jusqu’à onze heures. Ensuite, le mouvement commençait à se calmer. Par ci par là restaient des ivrognes, et, par endroits, on rencontrait des hommes et des femmes qu’on emmenait au poste.

Et voilà, des voitures se montraient de tous côtés, et toutes prenaient la même direction.

Sur le siège, le cocher, parfois en touloupe, le valet élégant avec une cocarde, les trotteurs gras, qui ont une couverture, volent sur le sol gelé à une vitesse de vingt verstes à l’heure. Dans la voiture, des dames, enveloppées de manteaux, veillent à leurs fleurs et à leur coiffure. Tout, depuis les harnais, la voiture, les roues caoutchoutées, le drap du cafetan du cocher, jusqu’aux bas, souliers, fleurs, velours, gants, parfums, tout est fait par ces hommes qui, tantôt ivres sont allongés sur leurs planches, tantôt sont dans les asiles de nuit, avec les prostituées, tantôt sont amenés au poste. Voilà, devant eux, avec tout ce qu’ils ont fabriqué, passent les gens du bal, et à ceux-ci il ne vient pas en tête qu’il y a un lien entre ce bal où ils se réunissent et ces ivrognes que leurs cochers interpellent sévèrement.

Ces gens, avec l’humeur la plus calme et l’assurance qu’ils ne font rien de mal, mais quelque chose de bien, se divertissent au bal. Ils s’amusent ! Ils s’amusent depuis onze heures du soir