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de son personnage comme Dieu. Le temple, avec ses rites, ses cérémonies, ses sacrifices, n’était que l’image de la vérité, et Christ c’est la vérité même. Alors, il est plus important que le temple, de même que la vérité est plus importante que l’image. Si donc aux prêtres du temple, aux serviteurs de l’image, il est permis de faire du commerce le jour du sabbat, sans enfreindre par là le repos du samedi prescrit par la loi, alors les serviteurs de la vérité même, ceux qui ont le pouvoir de supprimer les lois mêmes du sabbat, ne sont-ils pas d’autant plus innocents, quand, par nécessité, pour apaiser la faim, ces serviteurs de la vérité arrachent des épis et mangent à la gloire de Dieu[1].

Le sens de cette interprétation est que Jésus est lui-même le temple, c’est pourquoi les disciples peuvent manger le jour du sabbat. C’est par une interprétation ainsi défigurée qu’est remplacé le sens profond des paroles du Christ.

Si vous saviez, etc. Ayant justifié ainsi l’acte de ses disciples, le Sauveur apprend ensuite aux Pharisiens que leur condamnation injuste des disciples tient à l’incompréhension ou à une fausse compréhension des exigences morales supérieures. Les Pharisiens n’ont pas cet amour miséricordieux envers le prochain que Dieu exige (Osée, vi, 6). Ils ne sont attentifs qu’aux rites, aux cérémonies, aux coutumes traditionnelles, qui éloignent d’eux la source de l’amour pur. S’ils comprenaient que l’amour miséricordieux est supérieur aux traditions et coutumes, même supérieur aux sacrifices, ils ne condamneraient pas des innocents qui, pour calmer leur faim, arrachèrent des épis de blé.

Maître du sabbat. Celui qui est plus grand que le

  1. Ibid., p. 209.