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Ainsi le prophète Élie jeûna pendant quarante jours ; de même Moïse ; et le Christ jeûna, non parce que le jeûne lui était nécessaire, mais pour notre exemple. S’il ne jeûna que quarante jours, ce fut pour ne pas faire douter de sa personnification par une durée extrême du miracle. La prolongation de son jeûne, eût servi de prétexte à plusieurs pour douter de la vérité.

Dans la suite, il eut faim. Au bout de quarante jours, il sentit le besoin de nourriture « montrant ainsi sa nature humaine. »

Et il s’approcha de lui. Quand le Seigneur eut faim, le tentateur, profitant de cette circonstance, s’approcha de lui ouvertement.

Le tentateur. C’est-à-dire le diable. Le vrai fils de Dieu, c’est-à-dire le Messie, que Dieu lui-même, au baptême, appela solennellement son fils bien-aimé, de qui la voix descendait du ciel, témoignant : « Celui-ci est mon fils bien-aimé », de qui Jean rendait un témoignage aussi glorieux, tout à coup le tentateur le voit affamé ! Il s’étonne, se rappelant ce que l’on a dit de Jésus ; il ne peut croire que ce soit un homme ordinaire ; d’autre part, le croyant affamé, il ne peut admettre qu’il soit le fils de Dieu. Plein d’étonnement il s’approche de lui avec des paroles à double sens.

Ces pierres, qui se trouvaient probablement dans le désert à l’endroit où avait lieu la tentation. Le sens et la force de la tentation consistaient en ce que l’on proposait au Christ de faire un miracle sans autre nécessité que la satisfaction de ses besoins sensuels, c’est-à-dire d’abuser du miracle, donnant ainsi une preuve d’orgueil et de défi aux intentions de Dieu. Et voici qu’il a l’occasion d’agir de la sorte. Il a faim, « s’il est le Messie, pourquoi avoir faim quand d’un mot il peut transformer les pierres en pain et s’en nourrir ? Quel péché y avait-il à transformer des pierres en pain ? » (Théophile).

Il est écrit, etc. Le Christ repousse cette tentation,