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avait pas ces moyens mécaniques des sacrements, qui existent maintenant. La différence, c’est qu’autrefois, Jacques, Abraham, pouvaient se sauver par une vie bonne, par l’accomplissement de la volonté de Dieu dans la vie, alors que maintenant, on peut se sauver par les sacrements.

Tout cela serait parfait, mais avec cette doctrine il semble impossible d’admettre le salut, parce que le salut découle de l’activité libre de l’homme, tandis qu’avec le salut par les sacrements l’homme n’est pas libre. Le salut par les bonnes actions se distingue de tout autre en ce qu’il est absolument libre. Pour le bien moral, l’homme est aussi libre sur la croix que dans sa maison. Mais le salut par les sacrements ne dépend pas toujours de la volonté de l’homme. Malgré tout son désir d’être baptisé, de recevoir l’onction, de communier, l’homme peut n’avoir pas la possibilité de le faire. C’est pourquoi le salut par l’état de grâce paraît injuste. Adam pouvait être puni pour la pomme, qu’il pouvait manger ou non ; mais punir l’homme qui n’a pas l’occasion, la possibilité, de se faire baptiser, de communier, le punir pour cela, cela détruit la conception de la justice de Dieu. C’est ce qui résulte de la grâce de l’Église. Selon l’Ancien Testament, Dieu paraît grossier et cruel, mais toutefois, juste. Avec la grâce dont parle la hiérarchie, il apparaît comme un juge inique, une