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que nous avons à rechercher et ce que nous devons éviter, mais ne nous donne point l’amour et la force nécessaires, pour accomplir ce que nous avons reconnu notre devoir, que cet homme-là soit anathème !

Car… l’un et l’autre sont un don de Dieu, et la connaissance de ce qu’il faut faire, et l’amour du bien qu’il convient de faire. » (Dec., 126). « Si quelqu’un dit que la grâce de la justification nous a été donnée pour nous faire accomplir plus aisément ce qu’il nous eût été possible d’accomplir par le libre arbitre, en sorte que, sans cette grâce, nous eussions pu garder les commandements de Dieu, bien qu’avec plus de difficultés, qu’un tel homme soit anathème ! Car, en parlant des fruits du commandement, le Seigneur n’a point dit : Vous pouvez difficilement faire sans moi ; mais il a dit : « Vous ne pouvez rien faire sans moi. » (Jean, xv, 5), (Dec., 127), (p. 295-297).

Selon la théologie, c’est la première erreur. Une autre erreur, c’est de dire qu’aux uns Dieu a donné la grâce et les a désignés pour la condamnation, et qu’aux autres il a donné la grâce et les a destinés au salut. Voici comment il faut envisager cela :

Nous croyons que Dieu, dans sa toute bonté, a prédestiné à sa gloire ceux qu’il a élus de toute éternité ; mais ceux qu’il a rejetés, il les a livrés à la condamnation ; non point cependant qu’il ait voulu par là justifier les uns, abandonner et condamner les autres sans motif : cela ne sied point à Dieu, qui est le Père de tous, devant qui il n’y a point acception de personnes et « qui veut que tous les hommes soient sauvés et qu’ils viennent à la connaissance de la vérité » (i Tim., ii, 4) ; mais parce que Dieu a prévu que les uns feraient un bon usage de leur liberté et que les autres en abuseraient : c’est la raison pour laquelle il a prédestiné les uns à la gloire et condamné les autres.