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fille. Mais sentant qu’il serait désagréable à Volodia de savoir que deux petits frères étaient amoureux de la même jeune fille, je ne lui parlai pas de ma passion. À moi, au contraire, ce qui me plaisait le plus dans ce sentiment, c’était la pensée que notre amour était si pur, que nous restions amis bien qu’aimant la même créature charmante, et qu’au besoin, nous étions prêts à nous sacrifier l’un pour l’autre. Cependant, Volodia, me semblait-il, ne partageait pas tout à fait mon opinion quant à la disposition au sacrifice, car il était si passionnément amoureux qu’il voulut gifler et provoquer en duel un vrai diplomate qui, disait-on, devait épouser cette demoiselle ; et pour moi, peut-être était-il agréable de sacrifier mon sentiment parce que je n’avais parlé à cette personne qu’une seule fois, et sur les qualités de la musique savante, et que mon amour, malgré tous mes efforts pour l’enflammer, disparut la semaine suivante.