Tout était excellent ; les vins étaient des meilleurs crus étrangers ; tout se passa simplement, correctement et gaîment. Les vingt convives qui étaient au dîner avaient été choisis par Sviajski ; tous appartenaient au parti des « nouveaux » et, en outre, étaient spirituels et distingués.
On porta des toasts demi-plaisants au nouveau maréchal de la noblesse, au gouverneur, au directeur de la banque, etc., et « à notre charmant amphitryon ».
Vronskï était content. Il ne se serait jamais attendu à trouver en province tant de distinction et de simplicité. Vers la fin du dîner, la gaieté redoubla. Le gouverneur pria Vronskï d’assister à un concert au profit de « nos frères », organisé par sa femme, qui désirait faire sa connaissance.
— Il y aura un bal et tu verras notre beauté. Elle est remarquable.
— Not in my line, répondit Vronskï qui aimait cette expression, mais il sourit et promit de venir.
Au moment où l’on commençait à fumer, en sortant de table, le valet de chambre de Vronskï s’approcha de lui, portant une lettre sur un plateau.
— Un exprès de Vosdvijenskoié, dit-il d’un air important.
— C’est étonnant comme il ressemble au substitut du procureur Sventitzki, dit quelqu’un en français, parlant du valet de Vronskï, pendant que celui-ci, les sourcils froncés, lisait la lettre.