Page:Tolstoï - Œuvres complètes, vol17.djvu/179

Le texte de cette page a été corrigé et est conforme au fac-similé.

Après quelques mots destinés à le préparer, la comtesse Lydie Ivanovna, en soupirant profondément et rougissant, lui remit le billet qu’elle avait reçu.

Il le lut et garda longtemps le silence.

— Je ne me crois pas le droit de lui refuser, dit-il enfin timidement, en levant les yeux.

— Mon ami ! vous ne voyez le mal nulle part !

— Au contraire, je trouve que tout est mal. Mais serait-il juste de…

Son visage exprimait l’indécision, le désir d’un conseil, d’un appui, d’un guide dans une question aussi délicate.

— Non, interrompit Lydie Ivanovna. Il y a des limites à tout. Je comprends l’immoralité, dit-elle sans aucune sincérité car elle n’avait jamais pu comprendre pourquoi les femmes pouvaient être immorales, mais ce que je ne comprends pas, c’est la cruauté. Et envers qui ? Envers vous ? Comment peut-elle rester dans la même ville que vous ? Non, vivrait-on des siècles qu’on aurait toujours à apprendre, et moi, j’apprends tous les jours à comprendre votre grandeur d’âme et son indignité.

— Qui de nous jettera la première pierre ? dit Alexis Alexandrovitch évidemment content du rôle qu’il jouait. J’ai tout pardonné et c’est pourquoi je ne puis la punir de ce qui est un besoin de son cœur, son amour pour son fils…

— Est-ce bien de l’amour, mon ami ? Est-ce bien