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écrire le projet sur les nouveaux tribunaux, le premier de tous ceux qu’il devait composer sur les branches les plus diverses de l’administration.

Alexis Alexandrovitch non seulement ne remarquait pas sa situation désespérée dans le service, non seulement il n’en était pas attristé, mais plus que jamais il était content de lui-même : « Celui qui a une femme songe aux biens terrestres, pour plaire à sa femme, celui qui n’en a pas ne se soucie que des choses divines, ne songe qu’à plaire à Dieu », a dit l’apôtre Paul, et Alexis Alexandrovitch qui dans toutes les circonstances de sa vie prenait maintenant pour guide les saintes Écritures, se rappelait souvent ce texte. Il lui semblait que resté sans femme, seul avec ses projets, il servait Dieu mieux qu’auparavant.

L’impatience évidente du membre du conseil de l’Empire qui désirait le quitter ne troublait pas Alexis Alexandrovitch. Il ne cessa d’exposer son projet que quand son interlocuteur profitant du passage d’un des membres de la famille impériale s’esquiva.

Reste seul, Alexis Alexandrovitch baissa la tête, se recueillant, puis, jetant un regard distrait autour de lui, il se dirigea vers la sortie où il pensait rencontrer la comtesse Lydie Ivanovna.

« Comme ils ont l’air forts et bien portants ! », se dit-il en regardant le superbe chambellan aux favoris peignés, parfumés, et le cou rouge du prince en