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— Oui, oui.

Leur conversation fut interrompue par mademoiselle Linon qui, tout en dissimulant sa joie, venait en souriant tendrement complimenter son élève préférée. À peine fut-elle partie que les domestiques vinrent à leur tour apporter leurs félicitations. Ensuite arrivèrent des parents et commença cette heureuse agitation dont Lévine ne devait sortir que le lendemain de son mariage. Bien qu’il se sentît toujours mal à l’aise et ennuyé, la fièvre de son bonheur grandissait de plus en plus. Il avait conscience d’ignorer la plupart des choses qu’on lui demandait, aussi faisait-il tout ce qu’on lui disait et il s’en trouvait très heureux. Il avait pensé que ses fiançailles n’auraient rien de semblable aux autres, que les coutumes des fiançailles ordinaires gâteraient son bonheur si particulier, cependant il faisait ce que font tous les fiancés, et son bonheur, loin d’en être diminué, devenait de plus en plus particulier et ne ressemblait à aucun autre.

— Maintenant nous allons manger des bonbons, disait mademoiselle Linon, et Lévine allait acheter des bonbons.

— Eh bien ! je suis très heureux, lui disait Sviajskï ; je vous engage à acheter les fleurs chez Fomine.

— Ah ! vous croyez ?

Et il allait chez Fomine.