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en lui-même la voir souffrir en expiation de l’atteinte qu’elle avait portée à son repos et à son honneur. Il examina de nouveau les hypothèses du duel, du divorce et de la séparation, et de nouveau, les rejeta. Bref, il demeura convaincu qu’il n’y avait réellement qu’une seule issue : oui, il la garderait avec lui, afin de cacher aux yeux du monde la vérité, et il emploierait tous les moyens possibles pour parvenir à rompre leur liaison et, surtout, bien qu’il n’en voulût pas convenir, pour la punir. « Je lui déclarerai qu’après avoir examiné la situation pénible, faite par elle à notre famille, le statu quo, du moins pour l’extérieur, me semble la seule issue acceptable et la plus conforme aux intérêts de tous, et que je consens à l’observer, mais sous la condition expresse qu’elle se conforme à ma volonté, c’est-à-dire qu’elle cesse toute relation avec son amant. » Une fois cette décision bien arrêtée, Alexis Alexandrovitch la fortifia encore par une considération très importante : « En observant cette conduite, je me conforme aux prescriptions de la religion ; par cette décision, en effet, je ne chasse pas la femme criminelle, je lui laisse au contraire la possibilité de s’amender et même, quelque pénible que cela puisse être pour moi, je consacre une partie de mes forces à son rachat et à son salut. » Alexis Alexandrovitch, au fond de lui-même, ne s’abusait pas, il savait pertinemment qu’il n’avait sur sa femme aucune influence morale, que toutes ces tentatives