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dait le bruissement des feuilles de l’année précédente que déplaçait la neige fondante, et celui de la croissance de l’herbe. « Comment ! On entend et voit croître l’herbe ! » se dit Lévine en remarquant une feuille humide de tremble, de couleur ardoisée, qui s’agitait près d’une toute petite et toute jeune herbe. Il était debout, écoutait et regardait tantôt en bas sur la terre mouillée couverte de mousse, tantôt Laska aux aguets, tantôt les cimes dépouillées de la forêt qui s’étendait devant lui sur la colline, tantôt le ciel couvert de traînées blanches de nuages. Un épervier, sans se hâter, en agitant les ailes, vola au-dessus de la forêt lointaine, un autre qui suivait la même direction disparut. Les oiseaux gazouillaient de plus en plus fort dans les bosquets. Non loin criait un hibou et Laska, en tressaillant, faisait quelques pas, penchait la tête de côté et commençait à écouter. Le coucou chantait de l’autre côté de la rivière, deux fois il poussa un cri, puis voulut poursuivre et s’embrouilla.

— Comment ! Déjà le coucou ? dit Stépan Arkadiévitch sortant de son buisson.

— Oui, j’entends, répondit Lévine, mécontent de rompre le silence de la forêt. Maintenant ce ne sera pas long.

Stépan Arkadiévitch disparut de nouveau dans le buisson et Lévine ne vit plus que le feu vif de l’allumette remplacé aussitôt par la lueur rouge de la cigarette et une petite fumée bleue.