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Le vieux prince, après le départ du médecin, sortit aussi de son cabinet ; il embrassa Dolly, lui dit quelques mots puis s’adressant à sa femme :

— Eh bien, qu’avez-vous décidé ? Partez-vous ? Que faites-vous de moi ?

— Je crois que tu devrais rester, Alexandre, dit la princesse.

— Comme vous voudrez.

— Maman, pourquoi donc papa ne partirait-il pas avec nous ? dit Kitty, ce serait plus gai pour lui et pour nous.

Le vieux prince se leva, caressa de la main la chevelure de Kitty. Elle leva la tête, et s’efforça de sourire en le regardant. Il lui semblait toujours que son père, le meilleur de la famille, la comprenait, bien qu’il lui parlât peu. En sa qualité de cadette elle était la préférée du père et il lui semblait que son affection pour elle le rendait perspicace. Quand son regard rencontrait maintenant ses bons yeux bleus qui la fixaient, il lui semblait qu’il lisait en elle et comprenait tout ce qui s’y passait de mauvais. En rougissant elle se pencha vers lui pour un baiser, mais il caressa seulement ses cheveux et dit :

— Quelle mode inepte que ces chignons ! On ne peut même pas toucher la tête de sa propre fille, on caresse les cheveux de quelque femme défunte ; puis, s’adressant à sa fille aînée : Eh bien, Dolenka, comment vas-tu ? Ton atout, que fait-il ?