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gaie. Ses rapports avec Stépan Arkadiévitch, après la réconciliation, étaient devenus humiliants ; le raccommodage fait par Anna n’était pas solide et le lien familial cédait de nouveau à la même place. Elle n’avait aucune certitude, mais Stépan Arkadiévitch n’était jamais à la maison, l’argent aussi manquait sans cesse, et le soupçon d’infidélité hantait toujours Dolly ; elle le chassait par crainte des souffrances de la jalousie. Une fois le premier accès de jalousie passé, il ne pouvait revenir et même la découverte de l’infidélité ne pouvait agir sur elle comme la première fois ; une telle découverte la priverait seulement de ses habitudes familiales ; et elle lui permettait de la tromper en le méprisant et surtout se méprisant elle-même pour cette faiblesse.

En outre, les soucis d’une nombreuse famille l’assaillaient sans cesse : tantôt l’allaitement du nourrisson ne marchait pas ; tantôt c’était une bonne qui la quittait ; tantôt, comme maintenant, l’un des enfants tombait malade.

— Eh bien ! comment cela va-t-il chez toi ? demanda la mère.

— Ah ! maman, nous avons aussi nos peines ; Lili est tombée malade et je crains une scarlatine. Je suis sortie pour prendre des nouvelles de Kitty ; mais si c’est une scarlatine — Dieu nous en préserve — je m’installe près de ma petite malade et je n’en bouge plus.