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dans les plis de sa jupe rose ; de l’autre main, elle tenait son éventail dont, par mouvements courts et nerveux, elle éventait son visage brûlant. On eût dit un papillon venant de se poser sur l’herbe et prêt à reprendre son vol, développant ses ailes ; mais un désespoir amer lui serrait le cœur.

« Et si je me trompais ! Ce n’est peut-être pas vrai ! » pensait-elle ; et de nouveau, elle se rappelait tout ce qu’elle venait de voir.

— Kitty ? qu’y a-t-il donc ? dit la comtesse Nordston en s’approchant d’elle, sans qu’elle eût entendu le bruit de ses pas étouffés par le tapis. Je ne comprends pas.

Kitty se leva rapidement ; sa lèvre inférieure tremblait.

— Tu ne danses pas le cotillon ?

— Non, non, dit Kitty la voix étranglée par les larmes.

— Il l’a invitée devant moi pour le cotillon, — dit madame Nordston sachant que Kitty comprendrait de qui elle voulait parler. — Elle lui a dit : « Est-ce que vous ne dansez pas avec la princesse Stcherbatzkï ? »

— Ah ! qu’est-ce que cela me fait ? prononça Kitty.

Personne, sauf elle-même, ne comprenait sa situation ; personne ne savait que la veille elle avait éconduit un homme qu’elle aimait peut-être, le sacrifiant à un autre.