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tant une maison où il y avait une jeune fille à marier, il ne se soit pas expliqué puis que, tout à coup, sans un mot, il soit parti.

— Heureusement, pensait-elle, qu’il est si peu attrayant que Kitty ne s’est pas éprise de lui. Vronskï, au contraire, satisfaisait à toutes les exigences de la princesse. Il était très riche, intelligent, noble, une belle carrière militaire lui était ouverte à la cour, enfin il était charmant ; bref on ne pouvait désirer mieux.

Au bal, Vronskï, très visiblement, faisait la cour à Kitty ; il dansait avec elle et fréquentait assidûment sa famille ; on ne pouvait donc douter qu’il n’eût de sérieuses intentions. Mais, malgré cela, la princesse fut tout l’hiver dans un état horrible d’inquiétude et d’émotion.

Elle-même s’était mariée trente ans auparavant par l’intermédiaire de sa tante. Le fiancé, sur lequel on avait pris à l’avance tous les renseignements, s’était présenté et avait vu la jeune fille ; la tante, en qualité d’intermédiaire, avait recueilli et transmis l’impression produite de part et d’autre : l’impression était bonne. Ensuite, au jour fixé, la demande avait été faite aux parents et acceptée. Tout s’était passé très normalement, très simplement. C’était du moins l’opinion de la princesse. Mais pour ses filles, elle s’était rendu compte qu’un mariage qui semble un événement très simple, est en réalité difficile et compliqué. Que de craintes,