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même ? Est-ce bien là le programme que doive se proposer la pédagogie ? La première chose qui saute aux yeux c’est ce rapport étrange envers des enfants imaginaires, des enfants que moi, du moins, je n’ai jamais vus dans l’empire Russe. Les causeries et les indications qu’elle donne se rapportent à des enfants de deux ans, car les enfants de deux ans savent déjà tout ce qu’elle raconte. Quant aux réponses on n’en peut demander de telles qu’aux perroquets. Chaque élève de six, sept, huit, neuf ans, ne comprend rien à ces questions, précisément parce qu’il sait tout cela et ne peut comprendre de quoi on lui parle. De pareilles causeries décèlent l’ignorance complète ou l’absence du désir de connaître le degré de développement des élèves. Peut-être des enfants hottentots, nègres, ou quelques enfants allemands ignorent-ils ce qu’on enseigne dans de pareilles causeries, mais tous les enfants russes, sauf les idiots, en arrivant à l’école, non seulement savent ce que c’est que : en bas, en haut, le banc, la table, deux, un, etc., mais je sais par expérience que les enfants de la campagne que les parents envoient à l’école savent exprimer très bien et très correctement leurs pensées. Ils savent comprendre l’idée d’un autre si elle est exprimée en russe ; ils savent compter jusqu’à vingt et plus. En jouant aux billes, ils comptent par deux, par six, et savent combien il y a de boules et de paires dans six. Très souvent les élèves qui venaient à