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d’apprendre par cœur qu’il évitait consciemment, — bien qu’il fût le seul qu’il possédât, — et employait malgré lui à d’autres sujets : il fallait apprendre par cœur non les prières mais les contes d’Erchov ; il forçait d’apprendre par cœur l’histoire sainte, non d’après le livre mais d’après son récit mal fait et sans vie. Il en était de même de l’arithmétique et des syllabes. Et il était impossible de faire entrer dans la tête de ce malheureux maître, instruit à l’Université, que tous les reproches des grossiers paysans étaient mille fois fondés, que le sacristain enseignait beaucoup mieux que lui et que, s’il voulait enseigner à lire et à écrire, il devait le faire d’après bouki, az, ba, en faisant apprendre par cœur, et que, par ce moyen, il pouvait arriver à une certaine activité pratique. Mais le maître qui avait fréquenté l’Université, selon lui, avait étudié la méthode de Iasnaïa-Poliana, qu’il voulait, on ne sait pourquoi, prendre pour modèle.

L’autre exemple, je l’ai vu à l’école primaire d’une de nos capitales. Après avoir écouté le meilleur élève de la classe moyenne qui raconta l’histoire d’Alexandre le Grand, mon compagnon et moi voulûmes partir, mais le maître nous pria de prendre connaissance d’une nouvelle méthode d’enseignement de la lecture et de l’écriture inventée par lui et qu’il se proposait de publier. « J’ai choisi huit enfants, les plus pauvres, nous dit-il, et avec eux j’ai expérimenté ma méthode. »