battre », dis-je. — « À le rosser », me corrigea
Fedka qui, tout rouge, était assis en face de moi et,
d’émotion, tortillait ses doigts menus et noirs :
c’est son habitude. Aussitôt toute la classe éclata
d’un enthousiasme fébrile. Derrière, quelqu’un
poussa un petit gamin et personne n’y fit attention.
— « Ah ! ça c’est mieux !» — « En voilà des clefs ! »
etc. Et je continuai à raconter comment nous
avions chassé les Français. Les élèves avaient à
peine entendu que quelqu’un était arrivé en retard
sur la Bérésina et avait laissé échapper les Français
que Petka s’écriait : — « Je le fusillerais ! Pourquoi
était-il en retard ! » Ensuite nous nous sommes
apitoyés un peu sur les Français gelés, puis
nous avons franchi la frontière, et les Allemands
qui étaient contre nous sont devenus nos alliés.
Quelqu’un se souvint de l’Allemand qui était dans
la classe. — « Ah ! vous êtes comme ça ! Quand
nous sommes faibles vous êtes contre nous et
quand nous sommes forts vous êtes avec nous ! »
Et, tout d’un coup, tous se levèrent et se mirent
à conspuer l’Allemand si fort qu’on l’entendait
de la rue. Quand ils s’apaisèrent, je continuai à
narrer comment nous avions accompagné Napoléon
jusqu’à Paris et y avions replacé le vrai roi ; quel
triomphe, quelles fêtes nous eûmes, et, seul, le souvenir
de la guerre de Crimée gâta toute l’affaire.
— « Attends ! Je serai grand et je leur montrerai… » Si, en ce moment, la redoute de Schévardine ou le