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ne donne pas la mesure du bien-être, mais que l’apparition du salaire indique à elle seule la disparition du bien-être du peuple. Il est évident qu’il nous faut chercher d’autres bases que celles qui existent en Europe, et cependant l’économie politique européenne veut nous prescrire ses lois. Pour la plus grande partie du peuple russe, l’argent ne fait pas la richesse et la diminution du prix des objets fabriqués n’augmente pas le bien-être. Ainsi donc, les chemins de fer n’apportent à la grande majorité de la population aucun avantage. (Je prie de remarquer que je parle des avantages selon la conception du peuple lui-même et non de ces avantages que le progrès de la civilisation veut imposer par force.)

Selon le peuple russe l’augmentation du bien-être consiste dans l’augmentation des forces de la terre, de l’élevage du bétail, de la quantité de blé et, grâce à cela, dans la diminution de son prix, (veuillez remarquer que pas un seul paysan ne se plaint du bon marché du blé ; seuls les politico-économistes européens le consolent en disant que le blé sera cher et qu’alors il lui sera facile d’acheter des objets manufacturés, lui qui n’en veut pas), dans l’augmentation des forces ouvrières, (jamais un paysan ne se plaint qu’il y a trop de gens dans son village), dans l’augmentation des forêts et des pâturages, dans l’absence des plaisirs de la ville. Parmi ces biens, quels sont ceux que les chemins de fer apportent