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apprendre à lire et à écrire. Cette étude, comme on sait, consiste à apprendre par cœur des paroles en vieux-slave, incompréhensibles, et cela pendant trois ou quatre ans. Les connaissances ainsi acquises sont inapplicables à la vie. Les habitudes morales acquises de cette façon consistent à oublier tout respect pour les aînés, pour les maîtres, parfois à voler des livres etc. : c’est surtout l’oisiveté et la paresse.

Il me semble inutile de prouver que l’école où l’on apprend en trois ans ce qui peut s’apprendre en trois mois, est une école d’oisiveté et de paresse. Un enfant qui est obligé de rester immobile six heures durant devant un livre et d’étudier toute une journée ce qu’il peut apprendre en une demi-heure, s’habitue artificiellement à l’oisiveté la plus complète et la plus nuisible.

Au sortir d’une pareille école, les neuf dixièmes des parents, des mères surtout, trouvent leurs enfants un peu gâtés, physiquement affaiblis et éloignés de leur milieu. Mais le besoin d’en faire des hommes qui auront du succès dans le monde, les pousse à les envoyer plus loin, à l’école de la ville. Là, l’oisiveté, le mensonge, l’hypocrisie et l’affaiblissement physique se développent avec une intensité encore plus grande. À l’école du district, on voit encore des visages sains, dans les lycées on en voit rarement, à l’université presque jamais. Les sciences qu’on enseigne dans l’école du district