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ton résolu, le comte Orlov en regardant sa montre. Après il sera trop tard, il fait déjà jour.

L’aide de camp s’élança dans la forêt à la recherche de Grekov. Quand Grekov retourna, le comte Orlov Denissov, ému par l’échec de ses tentatives, par l’attente vaine des colonnes d’infanterie qui ne se montraient pas encore et par la proximité de l’ennemi (tous les soldats de son régiment éprouvaient la même chose), décida l’attaque. Tout en marmonnant il demanda un cheval. Chacun prit sa place, se signa et… Que Dieu nous garde ! De la forêt on entendit le cri : Hourra ! et les Cosaques armés de piques, une centaine après l’autre, comme les grains qui tombent du sac, s’élancèrent gaiement à travers la rivière, vers le camp.

Au cri désespéré, effrayé du Français qui le premier aperçut les Cosaques, tous ceux qui étaient dans le camp, non habillés, à demi endormis, abandonnèrent les canons, les fusils, les chevaux et s’enfuirent n’importe où.

Si les Cosaques avaient poursuivi les Français sans faire attention à ce qui était derrière et autour d’eux, ils eussent pris Murat et tout ce qui était là. Les chefs voulaient précisément cela, mais ils ne purent faire avancer les Cosaques dès qu’ils atteignirent le butin et les prisonniers. Personne n’écoutait plus les ordres. Ils firent quinze cents prisonniers, prirent trente-huit canons, des drapeaux, et, ce qui était le plus important pour les Cosaques,