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avoir une influence sur les manifestations de sa volonté, peut aussi avoir été la cause du salut de la Russie, et, par suite, le valet de chambre qui, le 24, oublia de donner à Napoléon des bottes imperméables, fut le sauveur de la Russie. Dans cette voie du raisonnement, cette conclusion est indiscutable ; elle est aussi indiscutable que celle de Voltaire quand il dit, en plaisantant, que la nuit de la Saint-Barthélemy eut lieu à cause d’une indigestion de Charles IX.

Mais pour ceux qui n’admettent pas que la Russie s’est formée par la volonté d’un seul homme, Pierre Ier, ni que l’empire français et la guerre contre la Russie aient été faits par la volonté d’un seul homme, Napoléon, ce raisonnement non seulement est inexact, déraisonnable, mais contraire à tout esprit humain ; et à cette question : « quelle est la cause des événements historiques ? » il se présente une autre réponse : « que la marche des événements est prédestinée, qu’elle dépend de la concordance de tous les actes des hommes qui participent à ces événements et que l’influence des Napoléons sur la marche de ces événements n’est qu’extérieure et fictive. »

Quelque étrange que paraisse au premier abord la supposition que l’ordre par lequel Charles IX ordonnait le massacre de la Saint-Barthélemy n’avait pas lieu par sa volonté et qu’il lui semblait seulement l’avoir ordonné, que la bataille de Borodino,