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rait par établir dans son sein des privilèges inviolables et des catégories exclusives, voilà ce qui serait nouveau dans le monde.

Rien n’indique que l’Amérique soit destinée à donner la première un pareil spectacle.

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quelques considérations sur les causes de la grandeur commerciale des états-unis

Les Américains sont appelés par la nature à être un grand peuple maritime. — Étendue de leurs rivages. Profondeur des ports. — Grandeur des fleuves. — C’est cependant bien moins à des causes physiques qu’à des causes intellectuelles et morales qu’on doit attribuer la supériorité commerciale des Anglo-Américains. — Raison de cette opinion. — Avenir des Anglo-Américains comme peuple commerçant. — La ruine de l’Union n’arrêterait point l’essor maritime des peuples qui la composent. — Pourquoi. — Les Anglo-Américains sont naturellement appelés à servir les besoins des habitants de l’Amérique du Sud. — Ils deviendront, comme les Anglais, les facteurs d’une grande partie du monde.

Depuis la baie de Fundy jusqu’à la rivière Sabine dans le golfe du Mexique, la côte des États-Unis s’étend sur une longueur de neuf cents lieues à peu près.

Ces rivages forment une seule ligne non interrompue ; ils sont tous placés sous la même domination.

Il n’y a pas de peuple au monde qui puisse offrir au commerce des ports plus profonds, plus vastes et plus sûrs que les Américains.

Les habitants des États-Unis composent une grande nation civilisée que la fortune a placée au milieu des déserts, à douze cents lieues du foyer principal de la civilisation. L’Amérique a donc un besoin journalier de l’Europe. Avec le temps, les Américains parviendront