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ses concitoyens. Il parcourt son pays en tous sens ; il visite toutes les populations qui l’habitent. On ne rencontre pas de province de France dont les habitants se connaissent aussi parfaitement entre eux que les 13 millions d’hommes qui couvrent la surface des États-Unis.

En même temps que les Américains se mêlent, ils s’assimilent ; les différences que le climat, l’origine et les institutions avaient mises entre eux, diminuent. Ils se rapprochent tous de plus en plus d’un type commun. Chaque année, des milliers d’hommes partis du Nord se répandent dans toutes les parties de l’Union : ils apportent avec eux leurs croyances, leurs opinions, leurs mœurs, et comme leurs lumières sont supérieures à celles des hommes parmi lesquels ils vont vivre, ils ne tardent pas à s’emparer des affaires et à modifier la société à leur profit. Cette émigration continuelle du Nord vers le Midi favorise singulièrement la fusion de tous les caractères provinciaux dans un seul caractère national. La civilisation du Nord semble donc destinée à devenir la mesure commune sur laquelle tout le reste doit se régler un jour.

À mesure que l’industrie des Américains fait des progrès, on voit se resserrer les liens commerciaux qui unissent tous les États confédérés, et l’union entre dans les habitudes après avoir été dans les opinions. Le temps, en marchant, achève de faire disparaître une foule de terreurs fantastiques qui tourmentaient l’imagination des hommes de 1789. Le pouvoir fédéral n’est point devenu oppresseur ; il n’a pas détruit l’indépendance des États ; il ne conduit pas les confédérés à la monarchie ;