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quand des hommes considèrent un grand nombre d’objets sous le même aspect ; lorsque, sur un grand nombre de sujets, ils ont les mêmes opinions ; quand enfin les mêmes faits font naître en eux les mêmes impressions et les mêmes pensées.

Celui qui, envisageant la question sous ce point de vue, étudierait ce qui se passe aux États-Unis, découvrirait sans peine que leurs habitants, divisés comme ils le sont en vingt-quatre souverainetés distinctes, constituent cependant un peuple unique ; et peut-être même arriverait-il à penser que l’état de société existe plus réellement au sein de l’Union anglo-américaine que parmi certaines nations de l’Europe qui n’ont pourtant qu’une seule législation et se soumettent à un seul homme.

Quoique les Anglo-Américains aient plusieurs religions, ils ont tous la même manière d’envisager la religion.

Ils ne s’entendent pas toujours sur les moyens à prendre pour bien gouverner et varient sur quelques-unes des formes qu’il convient de donner au gouvernement, mais ils sont d’accord sur les principes généraux qui doivent régir les sociétés humaines. Du Maine aux Florides, du Missouri jusqu’à l’océan Atlantique, on croit que l’origine de tous les pouvoirs légitimes est dans le peuple. On conçoit les mêmes idées sur la liberté et l’égalité ; on professe les mêmes opinions sur la presse, le droit d’association, le jury, la responsabilité des agents du pouvoir.