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Aucune barrière ne s’élève donc entre les différentes parties du pays occupé de nos jours par les Anglo-Américains. Loin que les Alléghanys servent de limites à des peuples, ils ne bornent même point des États. Le New-York, la Pennsylvanie et la Virginie les renferment dans leur enceinte et s’étendent autant à l’occident qu’à l’orient de ces montagnes[1].

Le territoire occupé de nos jours par les vingt-quatre États de l’Union et les trois grands districts qui ne sont pas encore placés au nombre des États, quoiqu’ils aient déjà des habitants, couvre une superficie de 131,144 lieues carrées[2], c’est-à-dire qu’il présente déjà une surface presque égale à cinq fois celle de la France. Dans ces limites se rencontrent un sol varié, des températures différentes et des produits très divers.

Cette grande étendue de territoire occupé par les républiques anglo-américaines a fait naître des doutes sur le maintien de leur union. Ici il faut distinguer : des intérêts contraires se créent quelquefois dans les différentes provinces d’un vaste empire et finissent par entrer en lutte : il arrive alors que la grandeur de l’État est ce qui compromet le plus sa durée. Mais si les hommes qui couvrent ce vaste territoire n’ont pas entre eux d’intérêts

  1. La chaîne des Alléghanys n’est pas plus haute que celle des Vosges et n’offre pas autant d’obstacles que cette dernière aux efforts de l’industrie humaine. Les pays situés sur le versant oriental des Alléghanys sont donc aussi naturellement liés à la vallée du Mississipi que la Franche-Comté, la haute Bourgogne et l’Alsace le sont à la France.
  2. 1,002,600 milles carrés. Voyez View of the United States, by Darby, p. 435.