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stances et celles qui composent les cimes arides et brisées des montagnes Rocheuses. Après avoir précipité la terre dans le fond de la vallée, les eaux ont sans doute fini par entraîner avec elles une partie des roches elles-mêmes ; elles les ont roulées sur les pentes les plus voisines ; et, après les avoir broyées les unes contre les autres, elles ont parsemé la base des montagnes de ces débris arrachés à leurs sommets (A).

La vallée du Mississipi est, à tout prendre, la plus magnifique demeure que Dieu ait jamais préparée pour l’habitation de l’homme, et pourtant on peut dire qu’elle ne forme encore qu’un vaste désert.

Sur le versant oriental des Alléghanys, entre le pied de ses montagnes et l’océan Atlantique, s’étend une longue bande de roches et de sable que la mer semble avoir oubliée en se retirant. Ce territoire n’a que 48 lieues de largeur moyenne[1], mais il compte 390 lieues de longueur[2]. Le sol, dans cette partie du continent américain, ne se prête qu’avec peine aux travaux du cultivateur. La végétation y est maigre et uniforme.

C’est sur cette côte inhospitalière que se sont d’abord concentrés les efforts de l’industrie humaine. Sur cette langue de terre aride sont nées et ont grandi les colonies anglaises qui devaient devenir un jour les États-Unis d’Amérique. C’est encore là que se trouve aujourd’hui le foyer de la puissance, tandis que sur les derrières s’assemblent presque en secret les véritables éléments du grand

  1. 100 milles.
  2. Environ 900 milles.