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ET DE RÉVOLUTION

marchands de noisettes, des limonadiers, et même des hodjas, — des bons ! — et le résultat de ces colloques le rendait mélancolique :

« S’ils le gardent, tout sera à recommencer. »

Dans le turbé de Sultan-Suleïman, mon guide a eu une longue conversation avec le gardien, un nègre bossu, en cafetan vert, qui ne semblait pas très au courant des choses politiques… Il vit avec les califes morts, ce nègre, et toutes ses pensées sont enfermées dans l’enceinte de marbre et de porphyre, sous la coupole rouge et blanche d’où pendent des œufs d’autruche et des lustres de cristal… Il époussette les cercueils impériaux couverts de châles si anciens que les fleurs et les palmes pâlissent, prêtes à tomber en poussière. Il époussette les turbans aux grandes aigrettes, côtelés comme des pastèques, et qui évoquent pour moi les « turqueries » des tapisseries et des peintures, d’après le Bajazet de Racine…

Mais le plumeau sous le bras, le nègre bossu oublie maintenant les cercueils souverains, les