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LA VIE AU HAREM

mon amie turque ce souci désintéressé qu’elle a de sa dignité corporelle. Elle soigne sa personne ; elle tâche d’être agréable à ses propres yeux, — et cela, c’est une marque de raffinement, de « civilisation », pour employer un mot qu’elle aime. Tant de ses compatriotes, à son âge, et délaissées, deviennent des masses de chair, sous d’informes caracos ! Mélek Hanoum veut rester femme, malgré son pédantisme innocent et elle a ri à mourir quand je lui ai raconté que les féministes révolutionnaires, à Paris, se coupaient les cheveux et portaient des vestons d’homme.

J’ai dit qu’elle tenait bien sa maison et que ce n’était pas un mérite commun à toutes les dames musulmanes. Il paraît que beaucoup d’entre elles laissent « tout aller », et que leur incurie et leur gaspillage compromettent la fortune du mari. C’est peut-être parce que la fortune du mari doit servir à l’entretien du ménage, celle de la femme demeurant intangible. Les caprices et les négligences de la hanoum ne lui coûtent rien et ne la compromettent pas per-