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PREMIERS JOURS

Paris. Mais elles sont, aux belles-mères turques, ce que la couleuvre est au cobra.

Je frémis. Cet homme a dû bien souffrir, à moins qu’il ne se moque de moi, avec sa douceur sournoise, son sourire pincé, son œil aiguisé de malice.

Il reprend :

— Quand nous nous marions, nous expliquons à nos femmes que nous sommes obligés de passer le pont, d’aller à Péra pour nos affaires. C’est à Péra que sont les banques, les ambassades, etc. Nos femmes ont un préjugé contre Péra, cette ville de liberté et de débauche où il y a des femmes en chapeau, dans les rues, et des femmes décolletées dans les salons. Pourtant, elles se résigneraient… Les affaires sont les affaires… Mais la vieille hanoum, la belle-mère qui est « à la turque », corps et âme, arrive un beau jour : « Où est ton mari, ma fille ? Est-ce qu’il te négligerait ? — Maman, il est à Péra. — À Péra ! Tu dis cela tranquillement… Il est à Péra ! — Oui, maman, pour ses affaires. — Ma fille, tu es une sotte, et ton mari un dé-