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PREMIERS JOURS

peur ?… C’est très bien… Il n’y avait aucun péril pour les étrangers, aucun… Et qu’est-ce que vous avez vu à Stamboul ?

Je raconte mes promenades, ma visite à la mosquée où les hodjas prêchaient les soldats mutins, le 23 avril, et la belle frayeur que m’ont faite les touloumbadjis.

Les officiers, rassemblés autour de nous, semblent s’amuser de cette histoire et de ce colloque.

— Général, je vous dois une sensation tout imprévue et sans doute unique dans ma vie : le réveil au bruit du canon, la fusillade toute voisine. J’ai pressenti ce qu’est la guerre. Et je ne l’aime pas du tout la guerre.

— Nous autres Turcs, nous aimons la guerre. Nous sommes surtout des soldats. Nous nous battons avec plaisir.

— Vous vous êtes battus pour une belle cause. Mais je suis femme. Je suis émue par les morts et les blessés.

— Pourtant, vous êtes allée voir les pendus ?