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l’âge de l’ingratitude

La jeune personne de quinze ans avait fini son éducation. Elle savait ce qu’elle devait savoir de grammaire, de calcul, d’histoire sacrée, de musique et d’italien. Petit bagage qu’il dépendait d’elle d’accroître. Au couvent, — surtout dans les couvents de province — elle avait pris des habitudes propres à former le caractère sinon l’esprit. Se lever tôt, se laver à l’eau froide, ne jamais se chauffer, ne jamais s’appuyer le dos, manger frugalement, n’être ni flattée, ni dorlotée, ni parée ; coudre, tricoter, aider au balayage et à la lessive, comme faisaient les demoiselles des grandes familles à Penthémont et à l’Abbaye au Bois.

Ce dressage dur, presque inhumain, façonnait des femmes solides, sérieuses, résignées à ne pas demander un très grand bonheur à la vie qui dépend de Dieu, et au mariage qui dépend de l’homme. Elles trouvaient, par comparaison avec le couvent, la maison paternelle confortable. On les mariait presque immédiatement. C’était dans l’ordre.