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la femme et son secret

Toutes ces fillettes sont amoureuses. Les parents ne s’en doutent pas. Ils croient qu’elles pensent à leurs poupées, à leurs compositions, à des goûters, à des robes neuves, à des jeux.

Oui, certes — et elles pensent aussi à des messieurs qu’elles adorent en silence, et même à des messieurs chauves !

Cet amour est pur. Ah ! qu’il est pur ! Les bribes de vérité que ces filles attrapent çà et là, sur la vie sexuelle, les intéressent follement, mais n’ont aucun rapport apparent et conscient, avec le « sentiment sublime » de l’amour. L’amour, c’est une chose du cœur. Même quand la grande sœur Dora se laisse courtiser par un beau lieutenant, Gretel, — complice comme la Louison du Malade Imaginaire, — ne voit aucun mal dans une aventure romanesque où elle joue son petit rôle. Un jour, le lieutenant apporte un bouquet de roses admirables pour Maman dont c’est la fête, et, dans l’antichambre, il appelle Gretel « Ange tutélaire de notre amour ». Gretel en crève d’orgueil, et elle avoue qu’en cette circonstance « on peut se rendre compte que l’amour ennoblit ». Mais Papa a eu vent de cette affaire. Il est furieux. Il avertit Dora :