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suivre la chasse du Roi, il y avait toujours, en bonne place, un joli petit phaéton bleu d’azur. Une jeune femme vêtue de rose y était assise, rênes en main, comme une Vénus d’opéra dans sa coquille marine. Quand le Roi passait devant elle, les yeux de la dame en rose soutenaient, sans fausse confusion, le regard du souverain qui s’arrêtait quelquefois sur elle ; et lorsque le tourbillon des cavaliers et des chiens s’éloignait, au strident appel des cuivres, le petit phaéton bleu se mêlait aux calèches et aux gondoles. Souvent, au détour d’une allée, il apparaissait, seul, détaché du gros de la foule, dans le moment même que le Roi pouvait l’apercevoir ; et quand les fanfares de l’hallali se répercutaient d’échos en échos, quand le royal chasseur, après la mort du cerf, s’en retournait vers Choisy, le léger phaéton frôlait parfois le lourd carrosse où le Roi, taciturne et pensif, écoutait Mme de Châteauroux qui causait avec Mme de Chevreuse.

Or, un de ces soirs de chasse, il advint que Mme de Chevreuse parla de la dame au phaéton bleu, nymphe des bois travestie en Parisienne. Louis XV, fort curieux des secrets de ses sujettes, et qui savait tant de choses par les rapports de sa