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amants mirent en commun de leurs pensées et de leurs sentiments, ce qui ne vieillit pas, ce qui peut subsister malgré la maladie et jusque dans les flétrissures de l’âge.

Lien sublime des grandes âmes, fleur suprême de la plante qui eut pour racine la volupté, cette amitié, pourtant, vaut ce que valent les amants ; et, telle que la marquise l’imagine, elle n’est pas d’une très haute qualité spirituelle. C’est une affection où la prudence et l’intérêt ont leur part. C’est une affection, cependant, et sincère, qui comporte un certain dévouement de la femme et une certaine fidélité de l’homme, que les méchants, certes, ne comprendraient pas, qu’ils appelleraient complaisance basse et faiblesse.

Garder les biens, les titres, le crédit, et s’il se peut, les accroître, et garder aussi le cœur de Louis XV — ce qui lui sert de cœur ! — sacrifier tout le reste et s’en faire un mérite, fortifier sa puissance par les abnégations qui devraient l’anéantir, cette idée traverse quelquefois l’esprit inquiet de la favorite. C’est une terrible partie à jouer, mais, si elle ne la joue pas, tout est perdu, car le Roi commence à sentir l’infériorité de sa maîtresse en tant que maîtresse, et la résistance secrète d’un corps