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duretés, son humeur taciturne, ses velléités de trahison, ses accès de repentir quand il a bien peur de la mort, tout cela n’entame point la chaîne serrée de l’habitude. Aime-t-il encore sa maîtresse ? Elle ne sait. Elle sait seulement qu’il craint les éclats et déteste les intrigantes. La maréchale de Mirepoix a bien deviné ce caractère, elle qui disait à la marquise : « C’est votre escalier que le Roi aime ; il est habitué à le monter et à le descendre, mais s’il trouvait une femme à qui parler de sa chasse et de ses affaires, cela lui serait égal au bout de trois jours… »

Mme de Pompadour ne veut pas qu’il trouve cette confidente. Les passades qu’il a pu s’offrir, elle consent à les ignorer ou à les pardonner, pourvu que l’amitié ne s’y mêle pas au plaisir. Elle accepterait des rivales que leur bassesse rendrait inoffensives. Les autres, elle luttera jusqu’à la mort pour les écarter.

L’amitié, oui, c’est l’amitié seulement qu’elle désire, l’amitié, faite de confiance et d’habitude, lien plus lâche que l’amour et plus solide, qui ne serre pas la chair, qui ne pèse pas à l’égoïsme et à la sensualité de l’homme, et qui pourtant retient, dans son nœud léger mais inextricable, ce que les