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lités techniques lui échappaient ; et cette interprétation qu’il en faisait n’était ni fausse, ni forcée, ni vulgaire, bien que superficielle et incomplète. En cela, il était un homme de son temps, de ce temps où il était presque impossible de trouver une chose absolument laide, où le plus petit bourgeois, l’artisan, le paysan même, ne voyaient, ne maniaient que des objets faits pour enchanter l’œil d’un artiste.

Mais cette sensibilité commune à tous les Français de son époque demeurait courte et limitée au joli. Elle ne réagissait pas sur les idées ; elle n’excitait pas, chez le Roi nonchalant, la haute curiosité intellectuelle et l’admiration pour les gens à talents. Louis XV — et non sans raisons — redoutait les beaux esprits ainsi que des éléments destructeurs, et s’il était flatté qu’il y eût sous son règne un Voltaire, il le craignait mais ne l’estimait pas, en le voyant aussi vaniteux qu’avide, ombrageux, jaloux de ses confrères et plein d’inquiétantes contradictions, extrême dans la flatterie comme dans le dénigrement et l’ingratitude. « Je l’ai traité, disait-il, aussi bien que Louis XIV a traité Racine et Boileau. Je lui ai donné une charge de gentilhomme ordinaire et des pensions. Est-ce ma faute, s’il a