tudes, de tes granits éboulés dans les gouffres, de la mélancolie du soir dans tes chemins ; ils rêvent de tes villages peuplés d’hommes graves et simples, fermes dans leurs traditions et dans leur foi, de tes mendiants riches d’un trésor de légendes et de tes jeunes filles aux yeux bleus. Ils tressaillent quand, dans les rumeurs des villes, résonne le dur parler de tes fils ; un peu de leur âme est resté dans le creux de tes rocs, dans les bruyères de tes landes, dans la dentelle de tes clochers…
Dans la campagne de Carnac, les formes tourmentées des arbres, tordus par les tempêtes d’équinoxe, donnent aux moindres taillis un caractère pittoresque. Des moulins abandonnés ouvrent leurs ailes cassées comme des bras de squelettes ; des murs crénelés, sous le noir linceul du lierre, sèment leurs pierres dans des fossés vides ; des calvaires du moyen âge attendent, au coin des routes, le salut pieux des laboureurs et partout, dans les bois de Kercado, dans les prairies de Kerlescan, dans les champs de Carnac, les dolmens et les menhirs — aînés des plus antiques ruines — sortent comme des sentinelles de granit de la verdure violâtre des landes.
En suivant la route d’Auray, blanche entre les petits murs de cailloux qui sillonnent la campagne, Robert Léris se laissait envahir par le charme de ce ciel délicieux, dont la mélancolie s’éclaire, les jours d’été, d’un sourire de joie. La première im-