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avant l’amour

survivant à ses ambitions dévastées, le jetait, pleurant, sur mes genoux ?… Ma misère pardonnait tout à sa misère, et l’ancienne consolatrice rouvrait ses bras.

Il releva sa tête, l’appuya à mon épaule, et d’une voix brisée :

— Ne me renvoie pas encore… laisse-moi là… Je ne te dirai rien qui t’offense… Je me calmerai peu à peu… Un moment de faiblesse… C’est que je pars demain et que je ne te reverrai plus.

— Qui sait ?

— Hélas !… Oh ! tu ne me repousses pas… tu as pitié… tu me crois, tu crois que je t’aime… Tu as vu — tout à coup mon cœur a éclaté… Ce départ… cet adieu… Ah ! chère, garde-moi près de toi, encore… Je suis sans force, sans volonté… Si tu savais quel poids énorme m’accable… mais ta petite main, en touchant mon front, m’allège et me soulage et me guérit… Je reconnais ton sein… tes cheveux… J’oublie… je rêve… Ah ! rester là… oublier… dormir…