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et de géographie que les fillettes de mon âge. Seule, mon instruction religieuse avait subi un singulier retard. On m’envoya donc rue des Feuillantines, chez madame Dumarquet, une institutrice osseuse et jaune, qui, mariée, avait l’air d’une vieille fille. Le pavillon qu’elle habitait, au fond d’une cour, datait peut-être de l’époque où cette même rue des Feuillantines avait vu passer les enfants du général Hugo. Les classes étaient situées au premier étage et nous prenions le repas de midi dans la grande pièce du rez-de-chaussée, qui ouvrait sur la cuisine et sur le prétendu jardin. Le mur était garni de portemanteaux où pendaient des tabliers noirs, des cartables de toile cirée, des chapeaux et des cordes à sauter, pêle-mêle. Je sens encore l’odeur particulière de cette pièce, quand des paniers ouverts s’échappait un complexe arome de chocolat, de viande froide, de fruits mûrs et de vin répandu. Une tourterelle familière roucoulait sur l’épaule de la sous-maîtresse et nous nous querellions pour lui offrir des miettes de pain. La récréation nous