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avant l’amour

sonne n’eût échappé à cette séduction, à ce charme sacré de la famille, centre d’honnêtes plaisirs et de calme repos, sans menaces, sans mystères.

Cependant ma main tremblait. Une inquiétude physique m’oppressait. Je sentais l’ennui de mon rôle et cet accablement des femmes adultères qui mesurent tout à coup, dans la sécurité du foyer, le poids du mensonge et l’irritation — délice, jadis — de la vie double. Ne serais-je jamais chez moi, libre, responsable, maîtresse de ma personne ? La fade existence de jeune fille m’écœurait comme une hypocrisie. Ah ! partir, aimer, vivre ou bien rester, mais affranchie de tout secret, et loyale ! Mornes pensées qui ne me quittaient plus.

M. Gannerault, après des réflexions sans intérêt, interpella soudain Maxime :

— Eh bien, cette grande nouvelle que tu nous faisais pressentir ? Espères-tu ? Travailles-tu ?

— J’espère, répondit Maxime, que je travaillerai bientôt.

Le visage de mon parrain s’épanouit.