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avant l’amour

et, passant entre les haies vives, je me dirigeai vers la petite rue des Plombelles dont les maisons coiffées de chaume forment le coin vraiment rustique du bourg. Le soleil oblique dorait les murs des fermes où grimpaient des rosiers sans roses. Par les éclaircies des jardins, dans l’infinie perspective des champs, blondissaient les meules entre les premiers labours. Les fonds de sapinières, les croupes des collines, se nuançaient de bleus différents dans un délicat brouillard. J’allais, gagnant la hauteur, le plateau où meurent les bruyères pauvres sous les ombelles noires des grands pins. Mais sans admirer les verts différents des molles pentes, les creux où frémissaient des trembles d’argent, la ligne des saules coupant la prairie, et plus loin la plaine d’automne où l’ombre violacée des nuages courait en mouvants îlots, je m’enfonçai dans un petit bois de châtaigniers et de chênes. Étendue sur les mousses flétries, la tête dans mes mains, je pleurai librement. Ah ! comme ils m’accablaient alors, le sentiment de mon