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avant l’amour

Il pressentait une scène conjugale, et son naturel craintif s’alarmait déjà…

— Allons, ne pleure plus… Ce gros chagrin passera… Va dormir, ma petite fille…

Je ne songeai même pas à me déshabiller… Je me jetai sur mon lit, mordant l’oreiller pour y étouffer ma plainte. Ah ! comme ils s’étaient tous coalisés pour me blesser dans ma tendresse, dans ma confiance, dans ma pudeur même… Désespérée de l’abandon de Rambert, j’imaginais pourtant des excuses à sa conduite ; je le sentais malheureux et repentant, et mon naïf amour était si sincèrement généreux qu’il excluait la rancune. Mais ma marraine… Celle qui était ma mère d’adoption, ma confidente naturelle, comment avait-elle pu se révéler si opiniâtrement injuste, mesquine, aveugle ! Oh ! quel mal elle m’avait fait !… Et en quoi étais-je coupable, moi, dont la première pensée avait été pour l’aveu sans artifice des sentiments de Rambert, moi qui avais suivi les recommandations de mon tuteur en remettant entre ses mains ma destinée… Je