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me l’a pas dit au bourg, mais voici ce qu’on m’a conté.

Les faucheurs, un peu las, s’étaient assis au bord de la petite rivière. Le poète était en veine de gamineries ; il avait pris le petit chapeau de Youen et, non sans se l’être quelque temps laissé tirailler par l’enfant, tout à coup le tenant bien à la fin, il l’avait jeté à l’eau. Youen saute dans l’Izole et le repêche, mais à peine de retour, il se jette sur le poète, saisit son grand chapeau à larges bords et l’envoie à son tour dans la rivière ; et puis ! non content du talion, c’est à grand renfort de cailloux qu’il précipite la descente du feutre. Jérôme, avec la politesse d’un hôte, — la rivière au bord de son pré était bien un peu sienne — Jérôme d’un bond fut debout, prêt à sauter dans l’Izole pour rattraper l’épave que le courant emportait ; mais Brizeux l’arrêta.

— C’est bien fait pour moi, dit-il ; son petit chapeau vaut bien le mien. Ayant chaud comme tu as, Jérôme, je ne le laisserai pas mettre les pieds dans l’eau.

Bref, ce fut Bertrand qui, par des manœuvres savantes, à quelque coude de la rivière, repêcha le chapeau à la pointe de son bâton. Les grands bords solennels avaient piteuse mine, Jérôme et Bertrand s’en désolaient et