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gustave

— Si je vous suis rendue, cher père, dit Emily d’une voix angélique, c’est à Dieu et à la Mère de notre divin Sauveur que je le dois. J’ai eu, durant ma captivité, le bonheur de connaître un peu la sainte religion catholique, grâce à un livre de M. Gustave, non, je puis dire à présent de ce cher frère. Échappé par lui un jour dans la prairie, je le ramassai dans le dessein de le lui remettre, mais, hélas ! le lendemain je me trouvai séparée de vous. Ah ! cher père, si vous connaissiez les délices que j’ai éprouvées chaque fois que je lisais les belles et touchantes prières qui y sont contenues, que j’apprenais à connaître les sublimes doctrines de l’Église catholique qui y sont dévoilées. Si vous saviez combien fut douce ma consolation, lorsque je vis que, là-haut, j’avais une mère en qui je pouvais avoir toute confiance. Cher père, lorsque je me crus perdue sans ressource, qu’il ne me restait plus que quelques heures pour choisir entre un joug odieux et la mort, je me jetai à genoux en m’adressant à cette Mère des affligés, et je lui fis la promesse que si je recouvrais la liberté, je me consacrerais au service de son divin Fils pour le reste de ma vie ; que dans ces maisons ou on aime à honorer et à imiter la Mère du Rédempteur, je passerais mes jours à aider et à soulager les infortunés… Ma prière a été exaucée… Que me reste-t-il à faire, mon père ? À vous de répondre pour moi : mon cœur me dit que vous approuvez d’avance ma promesse, et que vous-même m’appuierez dans ma résolution en me donnant votre consentement.

Tous les assistants avaient admiré la chaleur et la conviction avec lesquelles elle avait prononcé ces paroles ; son attitude respectueuse et suppliante envers son père les avait émus. Seul, M. Williams s’était levé subitement, un tremblement convulsif agitait tous ses membres ; un combat cruel, terrible se livrait en lui.

Emily, les mains serrées contre son cœur, comme pour en arrêter les palpitations, regardait fixement